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Contexte : cette interview a été enregistrée à la
fin de l'été 2005 et diffusée en tant que cadeau de Noël.
La transcription a été réalisée par Matthew, de Veritaserum, et corrigée
par Roonwit et Lisa Bunker.
Stephen Fry : C'est à Noël, il y a 5 ans, que j'ai fait l'étrange expérience
d'entendre ma voix à la radio durant toute une journée : c'était
le 26 décembre [un jour férié dans les pays anglophones] et Radio4
diffusait l'enregistrement de Harry Potter à L'Ecole des Sorciers.
Ce fut un privilège d'être la voix du travail de J.K. Rowling pour 6 livres,
2 764 pages et 100 heures et 55 minutes d'enregistrement.
Les personnages sont des amis - et des ennemis - pour moi, mais comme
des millions d'autres j'attends avec impatience chaque nouvel épisode.
La première fois que j'ai rencontré Jo remonte à presque sept ans, quand
elle est venue au studio où j'enregistrais le premier livre. Il
est de notoriété publique qu'elle est très discrète sur son travail,
et comme des millions de fans de Harry Potter, j'ai soif de savoir
comment c'est de vivre avec Harry, d'où l'inspiration pour les livres
lui vient, ce qu'elle pense des critiques, et ce qu'elle fera après
avoir terminé le dernier chapitre.
Alors quand Jo a accepté d'enregistrer une conversation avec moi, j'ai
sauté sur l'occasion.
Jo, j'imagine qu'une bonne question, pour commencer, serait simplement
de vous demander dans quel personnage vous vous retrouvez le plus
quand vous écrivez ou quand vous relisez ce que vous venez juste
d'écrire.
J.K. Rowling : Probablement Harry, vraiment, parce qu'il faut que je me
mette à sa place plus qu'à celle des autres, étant donné que tout
est raconté de son point de vue. Mais je pense qu'il y a un peu
de moi dans tous les personnages. On dit des écrivains, euh, je
pense qu'il est impossible de ne pas mettre un peu de soi dans aucun
des personnages, parce qu'il faut imaginer leurs motivations.
SF : Aviez-vous pensé, en planifiant toute l'histoire sans même savoir
si le premier livre serait publié, qu'autant de gens qui ne sont
jamais allé en pension s'identifieraient au monde très particulier
des pensions anglaises représenté par Poudlard ?
JKR : En fait, je ne suis jamais allée en pension moi-même. J'ai reçu
une éducation très générale. Mais il était essentiel pour l'intrigue
que les enfants se trouvent au même endroit le jour et la nuit.
Ils ne pouvaient pas être dans une école normale, parce que l'action
s'effondrerait s'ils rentraient chez eux chaque soir, qu'ils parlaient
à leurs parents, et que toutes les semaines ils doivent s'introduire
par effraction dans l'école pour s'y balader pendant la nuit. Il
fallait que ce soit un pensionnat. Ce qui était logique, car où
les sorciers pourraient-ils éduquer leurs enfants ? Cet endroit
regorgerait d'odeurs, de bruits, d'éclairs de lumière, et il faudrait
qu'il se trouve dans un endroit éloigné pour éviter que des Moldus
ne tombent trop souvent dessus.
Mais je pense que les lecteurs reconnaissent peut-être davantage la réalité
représentée par un groupe d'enfants enfermés ensemble que l'ambiance
d'un pensionnat. Je ne suis pas certaine d'être familière de cette
ambiance, mais je pense savoir comment sont les enfants quand ils
sont ensemble.
SF : En fait, vous avez inventé un monde - ça semble être la clé du succès
pour une fiction, avoir un monde régi par ses propres règles, sa
propre éthique, sa propre culture, son propre sens commun - et c'est
ce que vous avez fait, et c'est pourquoi il n'est pas inhabituel
d'entendre des enfants et des adultes dire qu'ils rêvent d'aller
à Poudlard, qu'ils rêvent de se trouver aux côtés de Harry, Ron
et Hermione, et ainsi de suite. Et naturellement, ce en qui résulte
également, c'est que vous recevez d'étranges avertissements de la
part de personnes que j'ai toujours imaginées avec des cheveux couleur
acier, une aiguille à tricoter plantée dedans et un chignon, et
qui disent que d'une certaine manière, tout ça est dangereux.
JKR : Oui.
SF : . pour certaines personnes, et en laissant de côté le débat selon
lequel la magie serait dangereuse ou pas, débat que je pense, nous
pouvons ignorer parce que.
[Tous les deux rient]
SF : . parce qu'il semble impliquer un tel degré de bêtise.
JKR : C'est ça. Il y a deux cents ans, les jeunes filles n'avaient pas
le droit de lire des romans parce que cela les exciteraient et leur
ferait espérer des choses qui n'existent pas. Et je me rappelle
avoir été très affligée, étant jeune, de lire qu'on avait dit à
Virginia Woolf de ne pas écrire car cela aggraverait son état mental.
Nous avons besoin d'un endroit dans lequel nous pouvons nous évader, que
l'on soit auteur ou lecteur, et bien sûr, le monde que j'ai créé
est un exemple particulièrement attirant d'un monde dans lequel
il est très agréable de s'évader. Cette magnifique image chez C.S.
Lewis, quand il y a les mares - le monde entre les mondes - dans
lesquelles on peut sauter pour accéder aux différents mondes. Et
ça, pour moi, ç'a toujours été une métaphore pour bibliothèque.
Je sais que ce n'est pas à cela que pensait Lewis en l'écrivant,
bien sûr.
SF : Oui, il écrivait des métaphores chrétiennes.
JKR : C'était plus une métaphore chrétienne pour lui, oui. Mais pour moi,
il s'agissait de sauter dans ces mares, d'entrer dans différents
mondes et, quel endroit magnifique. Et pour moi, c'est ce que la
littérature devrait être. Alors, qu'on aime Poudlard on qu'on le
déteste, je ne pense pas qu'on puisse le critiquer pour être un
monde que les gens apprécient.
SF : Non. Absolument. C'est pour ça qu'il a tellement d'emprise sur notre
imagination.
JKR : J'ai lu une interview de vous, dans laquelle j'ai été très flattée
de voir que vous établissiez un parallèle entre ce monde et celui
de Sherlock Holmes, et j'ai trouvé cette comparaison très flatteuse.
Elle a eu de l'écho en moi parce que quand je lisais les histoires
de Holmes, c'est bien sûr un monde qui n'a jamais vraiment existé,
et pourtant on peut croire de tout son cour à son existence et,
encore plus important, on veut qu'il ait existé, n'est-ce pas ?
SF : Exactement.
JKR : C'est pourquoi la lecture est un divertissement si fabuleux.
SF : Oui. Et c'est pourquoi Sherlock Holmes reçoit encore, jusqu'à ce
jour, des lettres au 221b Baker Street.
JKR : Exactement, oui.
SF : Et bien sûr c'est étrange que vous soyiez accusée de créer à la fois
un monde dans lequel les enfants peuvent s'épanouir grâce à la fantaisie
qui les fait s'évader, et un monde qui les effraie.
JKR : Mmm.
SF : .parce que il est si rempli de méchanceté et de danger.
JKR : Mmm.
SF : .et que ça pourrait les perturber. Maintenant, aucun de ces deux
mondes ne peut être réel.
[Tout deux rient.]
SF : Mais je pense que c'est une des avancées que vous avez opérées dans
la littérature pour enfants avec cette série remarquable, vous n'avez
pas dissimulé le difficile, l'effrayant et la traîtrise et l'injuste
et tout ce qui manipule le plus l'esprit des enfants.
JKR: Je ressens très fortement qu'il y a un mouvement pour épurer la littérature
parce que nous essayons de protéger les enfants, non pas nécessairement
des sinistres aspects de la vie, mais de leur propre imagination.
Je me rappelle avoir été en Amérique il y a quelques années et Halloween
approchait, et trois programmes de télévision d'affilée parlaient
de la façon d'expliquer aux enfants que ce n'était pas réel. Maintenant
il y a une raison pour laquelle nous créons ces histoires, et nous
les avons toujours créées, et une raison pour laquelle nous avons
eu ces festivals païens, et la raison pour laquelle même l'église
autorise un certain niveau de peur.nous avons besoin de ressentir
la peur, et nous avons besoin de confronter cela dans un environnement
contrôlé. C'est très important pour grandir, je pense. Et l'enfant
qui a été protégé des Détraqueurs en fiction, je dirais, est bien
plus susceptible de devenir une proie pour eux plus tard dans la
vie réelle.
Et aussi, que disons-nous aux enfants qui ont des pensées effrayantes
et dérangeantes ? Nous disons que c'est faux, que ce n'est pas naturel,
et ce n'est pas quelque chose qui est dans la condition humaine.
Qu'ils sont en quelques sortes bizarre ou malade.
SF : Exactement.
JKR : C'est une chose très dangereuse à dire à un enfant.
SF : Et la culpabilité entraîne le plus souvent la violence chez l'homme.
Et si les gens grandissent en pensant qu'ils sont bizarres parce
qu'ils ont des pensées sombres ou qu'ils sont conscients du côté
plus obscur du monde et de leurs vies, alors cela va faire d'eux
d'horribles êtres humains, n'est-ce pas ?
JKR : [doucement] Je suis totalement d'accord.
SF : Une des fonctions de l'écriture, dans un sens, est de nous montrer
qu'on n'est pas tout seul.
JKR : Oui, oui, c'est vrai, et certainement, j'ai découvert que je n'étais
pas toute seule à travers les livres, je pense, plus que je ne l'est
fait à travers l'amitié dans ma jeunesse, car j'étais plutôt une
enfant introvertie, et c'est à travers la lecture que j'ai réalisé
que je n'étais pas seule sur divers plans.
SF : Absolument. Et c'est une cause principale d'anxiété, si vous voulez,
que le lecteur soit toujours confronté à Harry, qu'il y ait cette
extraordinaire proximité qu'il a avec Voldemort, celui dont on ne
doit pas prononcer le nom, mais qui doit être nommé. Et je pense
qu'au fur et à mesure que la série progresse nous nous disons «
Mince, ce n'est plus très long maintenant ; que va-t-il se passer
? » Il y a beaucoup de spéculations, et je ne vous demande pas de
donner des réponses ici, mais il y a beaucoup de spéculations, par
exemple jusqu'à quel point cette relation est proche.
JKR : Mmm.
SF : .entre le sorcier le plus sombre de tous et notre héros, qui a sauvé
le monde.
JKR : Bon, la question que l'on m'a beaucoup posé très tôt était : « Voldemort
est-il réellement le père de Harry ? ». Et bien sûr, c'est une question
à la Star Wars.
SF : Exactement. Totalement Star Wars.
[Tout deux rient.]
JKR : .réellement, n'est-ce pas ? Et, non, ils ne vont pas se changer
en Dark Vador et Luke Skywalker. Voldemort n'est pas du tout, biologiquement
parlant, relié à Harry.
SF : En fait, c'est une très bonne réponse. Je crois que l'une des fins
qui revient le plus souvent, je ne sais pas si vous êtes au courant
de cela, aussi vite que vont les paris, et que Harry va vaincre
Voldemort aux dépens de tous ses propres pouvoirs, et il finira
par revenir dans le monde en tant que simple Moldu. [JKR pousse
un cri relevant du râle de façon théâtrale]. Ce qui est une idée
extraordinaire.
JKR : C'est une bonne fin.
SF : C'est une bonne fin ! Vous pouvez l'utiliser si vous voulez.
JKR : Et être poursuivie pour plagiat par environ 13 millions d'enfants.
SF : C'est votre problème n'est-ce pas ? Vous ne pouvez rien lire.
JKR : [gloussant] Non, je ne peux pas.
SF : .d'écrit par n'importe quelle personne autre que vous, juste au cas
ou. Bien, parlons si vous le voulez bien, de ce monde que vous avez
utilisé en des termes traditionnels, des lutins de Cornouailles
à, vous savez, les kelpies et, vous savez, la mention de types de
plantes particulier, comme les Mandragores et ainsi de suite.
JKR : Mmm.
SF : Tous sont réel et de nombreux enfants vont penser, bien évidemment,
que vous les avez complètement inventés.
JKR : J'ai pris d'horribles libertés avec le folklore et la mythologie,
mais je n'en ai pas tellement honte, parce que le folklore et la
mythologie britannique sont totalement hybrides. Vous savez, nous
avons été envahis par des peuples, nous nous sommes appropriés leur
dieux, nous avons pris leurs créatures mythiques, et nous avons
soudé le tout ensemble pour faire, je le pense, un des plus riches
folklores du monde, parce qu'il est si varié. Donc je n'ai aucun
remord à me servir librement et à ajouter quelques choses de mon
cru.
SF : Absolument.
JKR : Mais vous avez raison, oui, les enfants savent, évidemment, ils
savent que je n'ai pas inventé les licornes, mais j'ai dû expliquer
fréquemment que je n'ai pas non plus inventé les hippogriffes. Bien
qu'un hippogriffe soit plutôt obscur ; j'ai cherché des informations,
parce que lorsque j'utilise une créature dont je sais qu'elle fait
partie de la mythologie, j'aime découvrir le plus possible à son
sujet. Il se peut que je ne l'utilise pas, mais c'est utile pour
la rendre aussi consistante que je le ressens lorsqu'elle est bonne
pour mon intrigue. Il y a très peu de choses que j'ai pu lire sur
les hippogriffes.
SF : C'est la carte n'est-ce pas ? C'est le « Here Be Hippogriffs. »
JKR : Exactement. « Here Be Hippogriffs. », oui.
SF: Comme "Heffalumps in Pooh".
JKR: Mais les hippogriffes ne semblent pas avoir été observés avec précision
par de nombreux naturalistes médiévaux, donc je pouvais prendre
des libertés.
[Tous deux rient.]
SF : Je présume qu'il sont comme leur nom l'indique, et cela nous nous
amène à une autre de vos passions, la langue elle-même, à son niveau
le plus basique de mots et de dérivations, comme Hippogriffe, qui
est un mélange de l'idée.
JKR : Cheval.
SF.de l'irlandais « griffin » et du mot grec « hippo » signifiant « cheval
».
JKR : C'est exact.
SF : .ce qui est un parfait exemple du caractère hybride du folklore anglais,
comme notre langue.
JKR : Comme notre langue.
SF : C'est le parfait mélange.
JKR : C'est ce qui rend notre langue si riche.
SF : Exactement.
JKR : Noble, avec de la texture, je l'adore.
SF : Et même des mots comme « Mundungus » ont un sens.
JKR : Mundungus.
SF : N'est-ce pas formidable ?
JKR : N'est-ce pas un mot fantastique ?
SF : Et ça signifie ?
JKR : Tabac puant, ce qui lui convient parfaitement.
SF : Exactement. N'est-ce pas parfait ? Maintenant, est-ce qu'en réalité
vous consultez des livres de mots rares ou le OED [Oxford English
Dictionary] ou ce genre de choses, ou alors avez-vous une bonne
mémoire des mots ?
JKR : Hum... Je ne consulte pas vraiment les dictionnaires. Ce sont plutôt
des choses que j'ai recueilli ou bien que je découvre dans mes lectures.
Gilderoy est l'exception - Gilderoy Lockart. En fait, Lockart est
un nom bien connu en Ecosse.
SF : Oui.
JKR : Je l'ai trouvé sur une plaque commémorative. Je cherchais un nom
charmeur, impétueux, et « Lockart », sur la carte, m'a attiré, et
je l'ai pris. Je n'arrivais pas à trouver un nom chrétien. Et j'ai
parcouru le Dictionnaire d'Expressions et de Fables, une nuit. Je
cherchais intentionnellement des choses que je pourrais utiliser,
et j'ai vu Gilderoy, c'était en fait un brigand, et un très beau
chenapan.
SF : Vraiment ?
JKR : Et Gilderoy Lockart, ça sonnait tellement bien.
SF : C'est parfait, parfait...
JKR : Impressionnant, et pourtant assez creux, bien sûr.
SF : En effet, exactement tel qu'il était.
JKR : tel que nous le connaissons.
SF : Bien, revenons à quelque chose de très important, moi.
JKR : Oui, revenons, revenons à cela. [les deux rient]
SF : Je me demande si la façon dont j'ai lu les livres a changé d'une
façon ou d'une autre ce que vous avez écrit ?
JKR : Je sais que je vous en ai déjà parlé avant. A un moment, ma fille,
Jessica, qui a maintenant 10 ans - elle adore les cassettes - et
quand j'écrivais la Coupe de Feu, quand je travaillais dans la soirée,
et que j'entendais votre lecture dans sa chambre, c'est une expérience
qui fausse vos idées, d'écrire un livre en entendant la lecture
de la Chambre, ou d'Azkaban.
SF : Oui.
JKR : C'était bizarre et j'avais l'impression de ne pas pouvoir échapper
à Harry Potter. Il n'y avait pas de sortie. Je pouvais l'entendre,
je pouvais le voir, et j'écrivais sur lui.
SF : Oui. Et je dois dire, sans vouloir être flatteur, que les formes,
les expressions, l'équilibre des phrases font des livres des délices
à lire, en un sens.
JKR : Oui, c'est vraiment gentil, et c'est vraiment agréable à entendre.
SF : C'est vraiment ... les écrivains ont quelquefois un merveilleux sens
de l'écriture pour les pages et les mots arrivent dans cette partie
du cerveau...
JKR : Oui.
SF : ...mais c'est vraiment, terriblement difficile.
JKR : Vous voyez, j'adore écrire les dialogues.
SF : Oui.
JKR : J'aime vraiment écrire les dialogues.
SF : Oui.
JKR : Et quand je vous entends lire, cela me donne une nouvelle sensation
de plaisir, parce que je n'ai jamais lu mon travail à haute voix.
Alors entendre les dialogues, et je vous entends toujours les lire
avant que je n'entende les acteurs les dire - c'est vraiment un
plaisir, car j'aime vraiment les écrire.
SF : Chaque fois que je m'occupe d'un nouveau livre, l'ingénieur du studio
fait un CD avec tous les personnages.
JKR : Je me le rappelle, oui.
SF : Il va presque être nécessaire de faire un DVD, la prochaine fois
[rires]
JKR : Oh, désolée !
SF : Pour que je puisse me rappeler, vous savez, de ce à quoi ressemble
Lavande, ou alors, vous savez.
JKR : Oui.
SF : Avec un personnage particulier.
JKR : Bien sûr. Jessica voulait savoir comment vous arriviez à faire la
voix d'Hermione. Elle pense que vous êtes vraiment doué pour faire
Hermione et elle ne comprend pas comment quelqu'un qui a une voix
si profonde peut faire une voix de fille, donc je vous demande.
SF : C'est une question intéressante. J'ai toujours aimé le comédien écossais
Stanley Baxter. Vous vous rappelez de lui ?
JKR : Oh oui [rires].
SF : Et très jeune, à dix ans, j'ai remarqué que pour incarner une femme,
il rendait sa voix plus grave. Au lieu d'essayer de prendre une
voix de fausset, il disait : « Bonjour, je m'appelle Faith Douche
» [JKR rie] ou un autre personnage bizarre comme celui-là. Et ça
marche bien pour beaucoup de femmes.
JKR : Oui.
SF : Pas pour les jeunes filles, mais pour les adultes ça marche très
bien.
JKR : Il s'agit d'adoucir la voix, plutôt que de.
SF : Il adoucit les voix, exactement.
JKR : Je me rappelle être venue vous voir pendant que vous enregistriez.
Vous m'avez dit : « C'est très dur de « siffler » une phrase sans
consonne sifflante » [Tous deux rient] Un personnage devait dire
d'une voix sifflante : « Ne fais pas ça » [JKR rie de bon cour]
C'est encore une chose pour laquelle vous m'avez influencée. Quand
je veux que quelqu'un siffle, ce que Rogue fait souvent, je vérifie
toujours qu'il y a un « s » dans la phrase avant de.
SF : Oui.
JKR : Avant de le leur faire faire.
SF : Vous l'avez fait avec Rogue [Snape en anglais] et tout ce qui l'entoure
: il a trois « s » dans son nom, sa maison a un « s », et l'ensemble
est, vous savez, herpétique, je pense que c'est l'adjectif qui convient.
JKR : Oui, c'est vrai.
SF : On a parlé du côté serpent, maintenant, une question qu'on vous pose
très souvent, j'en suis sûr : pour plusieurs des générations à venir,
Harry Potter est le héros idéal pour les enfants. Mais il n'existait
pas quand vous étiez enfant. Avec qui aimiez-vous vous évader, avec
qui rêviez-vous d'être ?
JKR : Il y en avait des tas.
SF : Des tas.
JKR : J'aimais bien l'héroïne de The Little White Horse parce qu'elle
était quelconque, comme moi, alors que la plupart des héroïnes sont
très belles.
SF : Oui.
JKR : Elle avait des taches de rousseur et des cheveux roux, et je m'identifiais
beaucoup à elle.
SF : Eloise était un peu comme ça, aussi.
JKR : Oui, j'adore Eloise.
SF : Moi aussi.
JKR : Il y en avait tellement. J'aime beaucoup E. Nesbit. Je pense que
c'est l'auteur pour enfants à laquelle je m'identifie le plus.
SF : Oui.
JKR : Elle n'était pas très sentimentale.
SF : Non, c'est vrai.
JKR : Et elle aimait mettre des détails bizarres [Stephen rit] Alors,
euh, oui, je la trouvais très, très bonne. Je pense que les femmes
écrivains, en général, sont moins sentimentales que les hommes en
ce qui concerne l'enfance.
SF : Je suis tout à fait d'accord. La fiction pour enfants est étrange.
Il y a le style aventure vécue par un garçon.
JKR : Oui.
SF : . dont le meilleur exemple, à mon avis, est L'Île au Trésor.
JKR : Oui.
SF : Qui est l'un des livres les mieux écrits, tous genres confondus.
JKR : En effet, c'est un ouvrage merveilleux que j'aime beaucoup, moi
aussi.
SF : C'est un superbe livre, n'est-ce pas ? Et il n'y a presque aucune
femme dedans.
JKR : C'est vrai.
SF : Et ce que vous avez fait, c'est que vous avez écrit un livre d'aventures
vécues par un garçon, mais.
JKR : Mais avec des filles [rires].
SF : C'est aussi un livre de filles, ce qui est extraordinaire. Et, vous
savez, peut-être qu'on ne devrait pas trop parler des sexes : je
me rappelle avoir lu un livre de Martin Amis - je crois que c'était
The Information - et les personnages ont une énorme dispute à propos
de ce même sujet. Il quitte la table parce qu'on parle de, vous
savez, on dit que « les femmes lisent un certain genre de livres
et les hommes un autre ». Et ce sera toujours ainsi.
JKR : Oui.
SF : Mais est-ce que vous trouvez. J'imagine que vous recevez davantage
de lettres de femmes et de filles, simplement parce que les filles
sont meilleures pour écrire des lettres, comme vous dites [rires].
JKR : J'ai une théorie : j'en reçois à peu près cinquante pour cent de
chaque, et ma théorie est que les parents sont si contents que leurs
fils lisent qu'ils les poussent à m'écrire dans l'espoir que leur
enthousiasme ne faiblisse pas. Et, parfois, j'ai reçu des lettres
extraordinaires écrites par des garçons, des lettres très très touchantes
écrites par des garçons. Et même plus touchantes, en particulier
quand il s'agit d'une lettre manifestement écrite par quelqu'un
qui ne trouve pas très facile d'écrire, et qui me dit que c'est
le premier livre qu'ils aient jamais lu et qu'ils l'ont beaucoup
aimé.
SF : C'est un compliment formidable.
JKR : Oh oui, absolument.
SF : Et à cette merveilleuse pensée, vous devez rougir un peu...
JKR : Oui, je deviens toute rouge et fébrile [tous deux rient].
SF : Exactement, oui. "A quoi peut bien servir un livre qui n'a ni
images ni dialogues ?", se demandait Alice dans Alice au Pays
des merveilles, qui est pourtant un livre, à mon avis, que les adultes
aiment plus que les enfants.
JKR : Je suis d'accord.
SF : Mais c'est une remarque merveilleuse, et très sophistiquée, c'est
pourquoi les adultes aiment tant Alice. Je me demandais si, en plus
du coût d'impression de votre premier livre, Harry Potter à l'Ecole
des sorciers, la question des illustrations s'était présentée ?
Ou si c'était simplement : "Bon, c'est le plus gros livre pour
enfants que nous ayons jamais publié..."
JKR : Oui.
SF : La longueur. Nous n'allons pas ajouter des frais supplémentaires
en nous payant un Quentin Blake ou qui que ce soit d'autre.
JKR : Non. Mais vous avez absolument raison, c'était exactement le problème.
Ils pensaient également que des illustrations pourraient le diriger
vers un public plus jeune que celui qu'ils visaient.
SF : Oui. Je pense qu'ils avaient raison.
JKR : Ils avaient raison. Dans l'édition américaine, qui est très belle,
je dois l'admettre, il y a de tout petits dessins au début de chaque
chapitre, et j'aime bien ça. C'est juste un avant-goût de ce qui
va se passer.
SF : Oui.
JKR : Mais ils ne prennent pas toute la page.
SF : Pas des planches en couleur [des illustrations imprimées sur un papier
plus épais que le reste du livre].
JKR : Exactement, mais avant j'adorais les planches en couleur. Je feuilletais
les livres pour les trouver avant de commencer à lire.
SF : Oh, absolument. Absolument. Elles avaient une odeur spéciale, parce
que le papier était brillant, différent.
JKR : Elles avaient une odeur très spéciale.
SF : Oh, et parfois elles étaient effrayantes.
JKR : Oui.
SF : On savait que celle qu'on n'aimait pas arrivait bientôt.
JKR : Ouais.
SF : Je me les rappelle toutes. C'est bizarre, hein ? En parlant des Etats-Unis,
c'est Scholastic qui vous publie là-bas, je crois.
JKR : Scholastic, oui.
SF : Je me souviens que vous m'aviez parlé de votre première séance de
dédicaces aux Etats-Unis et...
JKR : Oh oui.
SF : Vous vous attendiez à ce que quelques garçons viennent, avec une
cicatrice maladroitement dessinée sur le front, mais vous avez eu...
JKR : Il y a eu...
SF : Vous avez eu une femme en dorures.
JKR : C'est exact.
SF : Parlez-nous-en !
JKR : J'ai reçu une femme habillée exactement comme la Grosse Dame, avec
un cadre accroché au cou. C'était extraordinaire, et jamais plus
je n'aurai davantage l'impression d'être une pop-star [SF rie].
J'ai passé la porte dans le fond du magasin, et il y a eu des hurlements,
de vrais hurlements, et des flashes, et je ne savais plus où j'étais.
J'étais complètement désorientée. Je crois que, comme un système
défensif, quand ce genre d'événement est terminé, je me ferme, je
pense que j'ai besoin de me refermer sur moi-même et de me dire
que c'était vraiment étrange. Puis je dois retourner à mon bureau
et me persuader que mon monde s'y limite.
SF : Ouais.
JKR : Moi-même, je trouve cette question très difficile, et pourtant c'est
moi qui ai inventé les personnages alors je ne vois pas pourquoi
vous trouveriez plus facile d'y répondre, mais je vais la poser
quand même. Y a-t-il un personnage auquel vous vous identifiez particulièrement
?
SF : La sagesse infuse et le caractère...
JKR : De Dumbledore.
SF : ... légèrement malicieux de Dumbledore. J'ai toujours eu cet amour
des grands enseignants. Avec le premier personnage de fiction que
j'ai [inintelligible] créé était pour une émission de radio, c'était
un vieux professeur de Cambridge, Donald Trefusis.
JKR : J'écoutais Donald Trefusis, oui.
SF : Vous rappelez-vous d'un archevêque de Canterbury, Ramsay, le dernier
des grands primats monumentaux de l'église anglicane ? Je ne parle
pas des singes, bien sûr. [JKR rie] Et je me souviens l'avoir vu
interviewé par une sorte de Malcolm Muggeridge, qui disait, « Vous
devenez quelqu'un de vraiment sage ». Il a répondu, « Le suis-je,
suis-je sage, je me demande, suis-je sage ? » [les deux rient] Et
l'intervieweur a répondu, « Et bien, Votre Grâce, peut-être pourriez-vous
expliquer ce que vous pensez qu'est la sagesse ? » « La sagesse,
la sagesse, mmmm, la sagesse, je pense que c'est la capacité de
se débrouiller.
JKR : Oh, est-ce.
SF : Ce qui est une merveilleuse définition, vous savez. C'est tellement
vrai, je veux dire, qu'elle vient, comme vous le savez, la sagesse
est le royaume de l'esprit, c'est l'esprit, le savoir de l'intelligence,
le mot allemand du savoir, wissenschaft [ndlt : Science en allemand],
etc., et dans l'esprit il y a un merveilleux.
JKR : Vous voyez, vous êtes Dumbledore. [SF rie] Un professeur inné.
SF : Et ce sentiment d'être capable d'assumer les choses.
JKR : Oui.
SF : Ce n'est pas tout à fait cela, selon vous.
JKR : Non.
SF : et vous ressentez.
JKR : quelque chose de complètement différent.
SF. qu'avec cette qualité merveilleuse, quoique parfois fatigante, que
possède Dumbledore, parce qu'il a tellement d'expérience, et il
est capable de faire face aux évènements, mais il préfèrerait presque
n'en être pas capable.
JKR : Absolument. C'est exactement ça. Dumbledore explique qu'il regrette
d'avoir toujours dû être celui qui savait, et qui supportait le
fardeau du savoir. Et il préfèrerait ne pas savoir.
SF : Mais de tous, bien sûr, c'est Harry Potter qui est l'élu, car il
est le point de conscience dans le livre. Harry est celui qui est...
qui subit tous les tests et les épreuves par le feu et toutes les
choses de ce genre. Et comme tout héros, vous vous mesurez à lui.
Et il y a des moments, quand je pense que je m'enfuirais simplement,
ou que je ne m'en occuperais pas. Je ferais un geste avec ma baguette,
même si je ne suis pas supposé le faire, vous savez.
JKR : Mon commentaire préféré sur Harry, au moment du premier livre. venait
d'un écolier, qui avait été interviewé à la télévision, et qui me
demandait pourquoi j'aimais tellement Harry - le personnage -, et
il disait, « il ne semble pas savoir ce qui se passe, souvent, et
je ne le sais pas non plus. » [SF rie].
SF : Oh, c'est tellement bon ! Je suppose qu'il y a des moments, quand
vous - vous savez, je pense que je vous l'ai dit quand j'ai lu pour
la première fois l'Ordre du Phénix - aviez-vous besoin d'être aussi
cruelle avec lui ?
JKR : Et bien, le Phénix, je dirais, pour ma propre défense - Harry devait
subir cela, à cause de ce que j'essaie de dire à propos de Harry
comme héros. Car c'est un héros très humain, et il y a bien sûr
un contraste entre lui, en tant que héros humain, et Voldemort,
qui s'est délibérément déshumanisé.
SF : Oui.
JKR : Et Harry, par conséquent, devait atteindre le point où il s'écroulait
presque, et dire qu'il ne voulait plus jouer, qu'il ne voulait plus
être un héros - et il avait tellement perdu. Et il ne voulait plus
perdre personne d'autre. Donc - le Phénix est le moment où j'ai
décidé qu'il éprouverait cette dépression nerveuse.
SF : C'est vrai.
JKR: Et maintenant il s'élèvera renforcé des cendres.
SF : C'est une telle énergie primaire, particulièrement avec les enfants,
et on la perd, je suppose, à nos dépens, le refus de l'injustice,
qui est l'une des premières forces motrices dans tous les livres,
n'est-ce pas ?
JKR : Le sentiment du garçon de 12 ans qu'ils ont accusé à tort - le sentiment
enflammé de l'indignation. Vous avez raison, nous ne devrions pas
perdre cela.
SF : Oui.
JKR : Mais on le perd, souvent.
SF : Oui.
JKR : Les adultes le perdent.
SF : Oui. Non, c'est plutôt vrai.
JKR : Je pense que la chose que je trouve la plus extraordinaire est -je
ne sais pas combien de personnages j'ai introduit pour le moment-
comment trouvez vous des voix pour eux ?
SF : Ce n'est pas facile de répondre. Je veux dire, si souvent ils sont
là et j'espère que, de façon générale, je.si ce n'est exactement
la voix que vous imaginez, j'ai fait quelque chose qui s'en rapproche.
Je veux dire, il y a des personnages comme Tonks pour qui, pour
une raison où une autre, j'ai instinctivement senti qu'elle avait
un peu ce, vous savez, cet accent à la Jane Horrocks. [JKR rit]
Et il m'a semblé que ça lui allait parfaitement.
JKR : En effet, oui.
SF : Et je pense que Celia, la productrice, avait la même idée en tête,
ce doit être ça.
JKR : Mmhmm.
SF : Et pourtant vous l'avez fait, il n'y a pas de « "put wood in th'ole."
JKR : Non.
SF : Et a propos de cette écriture nordique. C'est quelque chose qui est
là. Et je suis sûr que c'est parfois inconscient de votre part,
vous décrivez un personnage plutôt petit qui utilise des expressions
qui me font penser : « Oh, ça ressemble à un Londonien, ou c'est
un personnage âgé, ou un personnage jeune. »
JKR : Parce que vous saviez que Hagrid venait de l'Ouest.
SF : Oui.
JKR : Et c'était la seule chose dont je voulais vous prévenir avant que
vous ne commenciez à lire, et mon avion a eu du retard. C'était
la première fois que nous nous rencontrions. Et je suis arrivée
et la première chose que vous m'avez dite était : « J'ai imaginé
Hagrid comme quelqu'un venant du Somerset ».
SF : Oui.
JKR : Et j'ai pensé « Merci mon Dieu ! », parce que j'avais pensé que
si vous l'aviez imaginé venant de Glaswegien [SF rit] vous savez,
ça aurait pu.c'était le seul personnage dont je voulais absolument
que l'on reconnaisse l'accent.
SF : Oui, oui.
JKR : Ce que j'aime vraiment dans votre lecture, c'est que les accents
ne sont pas dérangeants. Je n'ai pas le sentiment que vous essayez
de faire une sorte de performance de virtuose de « Ce sont tous
les accents que je peux faire. », ou de différentes voix. Vous ne
constituez pas une barrière entre l'auditeur et l'histoire, je pense.
Vous voyez ?
SF : Je vois exactement.
JKR : Vous voyez ce que je veux dire ?
SF : C'est précisément mon but, de ne pas me mettre en travers du chemin.
JKR : Oui.
SF : Pour les gens c'est comme ne pas entendre la voix après un moment.
Et vous savez quand on lit, parfois on la perd, alors on doit revenir
en arrière et.
JKR : Oui.
SF : .parce qu'on est conscient des lettres, des mots. Ce qui fait qu'on
peut lire un chapitre entier sans avoir eu l'impression d'avoir
tourné une page.
JKR :Mmhmm.
SF : Je veux dire, vous savez, il n'y a pas d'encre ni de papier. Et ça
doit être la même chose avec ma voix quand ils l'écoutent, vous
savez. Il y a le premier paragraphe ou presque, et ensuite leur
esprit c'est le monde des Dursleys, et de Poudlard, et le Magicobus,
et ils ne remarquent pas que je le fais. Et Celia, la productrice
et Helen sont vraiment douées pour veiller à ce que je ne surjoue
pas une voix ou une mimique, ne pas trop en faire. Et le seul autre
problème est le rythme, vous savez.
JKR : Oui.
SF : Je pense que c'est tellement important de « rafraîchir » une page.
JKR : Oui, Oui.
SF : Vous voyez ? Parce que sinon on peut un peu s'endormir.
JKR : Mmhmm.
SF: Et.mais on ne doit pas pour autant en faire trop.
JKR : Je crois que je ne devrais pas vous emmener sur ce terrain, mais
y a t'il des scènes que vous avez particulièrement, où dont vous
vous souvenez, aimé lire ?
SF : Euh, et bien.toute ce passage frissonnant à l'apogée de l'Ordre du
Phénix, vous savez, dans les entrailles du Ministère de la Magie
et ce qui vient après. J'aime le fait que c'était si effrayant,
terrifiant et dramatique et j'ai adoré, vous savez, mettre en place
la tension et aussi, les étranges boules de verre et, ce qu'ils
sont censés faire pour ensuite être coincés derrière des portes.
JKR : Quelques enfants m'ont dit qu'ils l'avaient mieux perçu quand vous
leur aviez lu que lorsqu'ils l'avaient lu eux-mêmes, et je pense
que c'est parce qu'avec « Phénix », parce que les gens avaient eu
à l'attendre 3 ans, ils ont foncé à travers le livre.
SF : Ils ont lu trop vite. Ils ont sauté en avant et ont perdu le fil.
JKR : Ils l'ont littéralement dévoré. Exactement. Et ensuite des lecteurs
m'ont dit : « Je l'ai relu et il y a beaucoup plus de choses que
je ne le pensais. » Et c'est parce que tu l'as lu en une après-midi,
n'est-ce pas ? Donc vous écouter, je pense, leur a réellement permis
d'avoir des repères.
SF : Est-ce vrai que vous avez tout planifié ?
JKR : Oui, c'est exact.
SF : C'est surprenant.
JKR : Oui, je sais ce qui va se passer à la fin. Et quelque fois, j'ai
des sueurs froides quand quelqu'un devine quelque chose de très
proche, et ensuite je panique et je pense : « Oh, est-ce si évident
? » et ensuite quelqu'un dit quelque chose qui est si loin du compte
que je pense « Non, ce n'est pas du tout si évident que ça ! ».
SF : Bien.
JKR : Je me laisse toujours de la marge pour prendre un peu de distance
par rapport à la trajectoire, mais le plus souvent je la suis. Tant
de choses dans les six premiers livres sont liées à ce qui se passe
dans le septième. Et on dérape en quelque sorte, directement de
la fin du six au sept. Vous savez, ce n'est pas l'aventure discrète
que les autres ont tous été, même si il y a le thème sous-tendant
du face à face entre Harry et Voldemort, dans chaque cas, et -vous
le savez mieux que quiconque- il y a une aventure qui s'est résolue
elle-même.
SF: Oui, exactement.
JKR : Alors que dans le tome 6, bien qu'il y ait une fin qui pourrait
être vue comme définitive en un sens, on sens vraiment fortement
que l'intrigue n'est pas finie et que ça va continuer.
SF : Oui.
JKR : C'est un sentiment bizarre. Pour la première fois je suis très consciente
que je suis en train de finir.
SF : La fin de la bande est proche.
JKR : La fin est en vue, oui.
SF : C'est extraordinaire.
JKR : Oui.
SF : Vous écrirez toujours parce que c'est un besoin que vous avez. Est-ce
que vous imaginez que vous écrirez pour des enfants la prochaine
fois que vous ferez quelque chose de nouveau?
JKR : Euh.il y a un.
SF : Ecririez vous pour des enfants qui étaient enfants et qui sont maintenant
adultes ? Qui étaient votre première génération ?
JKR : Les pauvres, jamais débarrassés de moi. Euh.je ne sais pas. Sincèrement,
je ne sais pas. Je suis.il y a un autre livre pour enfants qui moisit
en quelque sorte dans un placard et que j'aime plutôt, qui est pour
des enfants un peu plus jeunes, je dirais. Mais il y a d'autres
choses que j'aimerais écrire, aussi. Mais je pense que j'aurais
besoin d'un bon pseudonyme et de faire ça en secret.
SF : Oui.
JKR : Parce que j'ai très peur, vous imaginez.
SF : Oh, absolument.
JKR : .de l'insupportable battage publicitaire.
SF : Oui.
JKR : .qui s'occuperait d'un livre post-Harry Potter.
SF : Oui.
JKR : ..et je ne suis pas sûre d'attendre cela impatiemment.
SF : Bien, avec cet incursion tentante vers le futur pour Jo, et la question
qui reste en suspend de savoir si nous reconnaîtrons son travail
post-Potter, nous nous sommes séparés et j'ai expédié 600 pages
de plus sur Harry. J'attends impatiemment le tome 7. Comme de nombreux
fans, je veux savoir ce qui se passe à la fin. Mais je ne veux pas
réellement que la fin arrive.
Interview traduit par Hedwige, Nikopol54,
Pegase et Jessica.
Version originale en anglais disponible sur le site de
Quick
Quote Quill.
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